Histoire de Rollot
- Rollot au Moyen-Âge -
Livre IV - Chapitre II
Ludovic Baillet

Livre IV - Chapitre II

Les treize textes issus du cartulaire de l'abbaye de Saint-Corneille de Compiègne amènent un certain nombre de remarques, d'analyses et de commentaires. D'autant plus que certains de ces textes ont été utilisés incorrectement dans diverses monographies.

Quelques remarques

L'origine de Rollot

De nombreux historiens estiment que l'origine de Rollot correspond à la fondation de l'actuel hameau de la Villette. Ainsi, Maxime de Sars écrit au début du chapitre II de Rollot et ses hameaux : « la Villette est l’agglomération la plus ancienne du terroir communal ».

D'autres historiens (cf. Monographie de Rollot par la Société des antiquaires de Picardie) vont plus loin en affirmant que la fondation de la Villette remonte à l'an 877 : « Vers 877, ce domaine, villa regia, fut donné par Charles le Chauve à l'église de Notre-Dame de Compiègne, qui devint l'abbaye de Saint-Corneille ; les moines y bâtirent une chapelle ; telle fut l'origine de la paroisse de la Villette. (...) Au début, La Villette était la paroisse de Rollot ».

Ces deux affirmations sont erronées. Il s'agit à l'évidence d'affirmations fantaisistes.

Commençons par démontrer qu'il n'est pas possible d'affirmer que la fondation du hameau de  La Villette remonte à l'an 877. Le premier texte du cartulaire de l'abbaye de Saint-Corneille traite de la Fondation du monastère de Notre-Dame de Compiègne et dédicace de sa Basilique le 5 mai 877. Le lecteur attentif découvrira qu'aucun lieu-dit de Rollot n'est cité dans ce texte (en particulier, « villa regia » n'est pas cité), alors que la commune de Mesvillers y est citée. Le fait que la commune de Mesvillers soit  presque toujours citée conjointement avec des lieux-dits de Rollot dans les textes ultérieurs est très certainement à l'origine de l'erreur que nous cherchons à combattre.

Les textes issus du cartulaire de l'abbaye de Saint-Corneille de Compiègne, et d'autres cartulaires mentionnent séparément les villages de Rollot, Pronastre, La Villette, La Madeleine et Regibaye :

Manifestement, l'ensemble de ces villages existaient non seulement conjointement mais aussi simultanément. Concernant la distinction entre Pronastre et La Villette, Maxime de Sars note habilement : « Pronastre survit dans le lieudit tout voisin, le Pronac ».

Pour une raison obscure, Pronastre a disparu au début du XIIIe siècle au profit du village de La Villette. Certains auteurs se sont risqué à écrire que « La Villette remplaça le lieu détruit de Pronast, près Rollot » (Abbé Paul Decagny - Chaulnes et ses environs). Cette affirmation est fausse puisque l'on a vu que Pronastre et La Villette étaient deux villages séparés qui existaient simultanément à la fin du XIIe siècle.

Malgré nos nombreuses interrogations sur l'origine des villages, nous avons une certitude : il n'est pas possible d'affirmer que La Villette est le berceau de Rollot.

 

Pronastre ou Provastre ?

Certains auteurs écrivent Provastre. C'est le cas notamment de l'abbé Godard dans sa Notice historique sur Rollot et ses dépendances, de Victor de Beauvillé dans son Histoire de la ville de Montdidier et de la Société des antiquaires de Picardie dans une Monographie de Rollot.

A l'inverse, Maxime de Sars écrit Pronastre dans Rollot et ses hameaux. Idem pour le chanoine Morel dans son cartulaire de l'abbaye de Saint-Corneille de Compiègne.

Nous retiendrons évidemment l'appellation Pronastre et non Provastre. Il semble que le terme Provastre ait été inventé afin d'expliquer comment certains textes de la fin XIIe pouvaient évoquer « Pronastre » alors que les textes ultérieurs mentionnaient « La Villette ». Il est clair que le terme « Provastre » pouvait ressembler à une appellation ancienne de « La Villette ». De là, cette fausse appellation permettait de donner un semblant de crédibilité à l'hypothèse selon laquelle La Villette est le berceau de Rollot. Cette suite d'erreurs a malheureusement été recopiée par les auteurs successifs.

L'historien Maxime de Sars ne s'est pas trompé : il écrit Pronastre et non Provastre ; et nous notons que Maxime de Sars cite dans sa bibliographie aussi bien Victor de Beauvillé, que le chanoine Morel, que la Société des antiquaires de Picardie.

 


Quelques commentaires

Le seigneur de Rollot, grand homme ou escroc ?

Les textes 5 et 6 issus du cartulaire de l'abbaye de Saint-Corneille de Compiègne sont intéressants à plus d'un titre : ils sont très inhabituels et sont étonnamment passés sous silence par nos historiens.

Petit rappel des faits. Vers 1171, le seigneur de Rollot, Pierre de la Tournelle est accusé d'extorsion tandis que l'abbé de Saint-Corneille est accusé de détournement. En d'autres termes, Pierre vole ses concitoyens pour son profit personnel, et l'abbé n'est pas plus clair dans cette sombre histoire. Les habitants de Rollot se révoltèrent contre cette situation et portèrent plainte à juste titre auprès des plus hautes autorités (le souverain Pontife) afin de faire cesser les abus. Pierre se défendit comme il put, et c'est au terme d'une enquête que la justice se prononça. Ainsi, Pierre fut sanctionné et dut s'engager à ne plus commettre de délits (cette sanction s'apparente à une peine avec sursis). L'abbé fut remis dans le droit chemin.

Néanmoins, ce seigneur de Rollot qui régnait sur Montdidier et alentours a permis quelques réalisations importantes rien qu'à Rollot. Outre la chapelle de Sainte Madeleine bâtie vers 1150, il n'est pas impossible qu'il soit à l'origine de la motte castrale de Rollot, bâtie au XIIe siècle, et toujours présente au cœur de notre bourg.

 



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